Abrogation ou déclaration en nullité ?

Publié le 29 Mai 2013

Abrogation ou déclaration en nullité ?

Alors que les grandes voix de l'UMP se déchirent quant à la marche à suivre vis-à-vis du dispositif législatif Taubira, une petite réflexion inspirée par le droit canonique semble s'imposer. Les uns s'apprêtent déjà, défaits et tristes sires, à célébrer ou accepter des parodies de mariage quand les autres, sincères et tout aussi soucieux de la vérité que du bien commun, mettent en avant leur conscience ou leur bon sens philosophique et juridique pour défendre la société contre les attaques d'un nouveau genre qui lui sont faites depuis quelques temps.

La Dépêche du Midi1, une honte du journalisme savamment sous-tirée « Le journal de la démocratie », se croit par exemple autorisée à classer les hommes politiques de droite en deux catégories clairement distinctes : d'un côté, les « réalistes » affirmant que l'on ne peut pas « revenir en arrière [sic] » sur ce sujet ; de l'autre, les « extrémistes » souhaitant purement et simplement abroger le texte. Quel meilleur moyen pour discréditer son adversaire, en effet, que de le taxer d'irréaliste et d'« extrémiste » ? Je vous le demande.

Pourtant, puisque nous parlons de mariage, invoquons – pour commencer – le droit canonique, né il y a un un peu plus longtemps que Mme Christiane Taubira, de sinistre mémoire. En ce domaine socio-religieux, l'on peut parler de « déclaration en nullité » d'un mariage, si les conditions nécessaires à sa validité ne sont pas réunies et ne l'ont jamais été. De manière abusive, beaucoup trop emploient le terme d'« annulation » d'un mariage. Or, l’Église romaine n'a pas l'orgueil de casser un lien indissoluble que Dieu lui-même a tissé entre deux époux consentants. Par conséquent, déclarer un mariage « nul » revient à constater que le couple considéré jusque-là comme étant apparemment marié, en fait, ne l'est pas et ne l'a jamais été. La présomption de droit disparaît alors, puisque son support conditionnel n'était point, n'est toujours pas et ne sera jamais, malgré les apparences du fait. « Annuler » un mariage est donc une très mauvaise expression sous-entendant qu'un lien matrimonial véritable aurait existé entre deux personnes, un certain temps, avant d'être cassé par une autorité quelconque : c'est le divorce républicain, c'est-à-dire ce qui ne peut être – selon l’Église catholique – que l'institutionnalisation de la polygamie ou de la polyandrie, n'étant alors pas d'un genre simultané mais – comme le disait avec humour Lévi-Strauss – successif. C'est bien cela.

Dans le contexte actuel, l'expression d'« abrogation » ne me fait que trop penser à celle d'« annulation ». Nos bons juristes, et heureusement ils sont encore nombreux bien que peu visibles à travers « les media de l'oligarchie2 », devraient réfléchir – afin de dissiper les desseins des destructeurs de la famille – à cette future possibilité scripturaire : un nouveau texte, de bon sens, qui ne se contenterait pas d'« abroger » uniquement une loi passée – cela reviendrait nécessairement à reconnaître la réalité, la légalité et la légitimité de ses clauses, principes et effets, ainsi que la perverse philosophie du droit qui l'avait rendue possible en apparence et seulement en apparence – mais la reconnaîtrait simplement comme étant nulle et non avenue, du début à la fin de sa prose, en tous lieux et en tous temps, fallacieuse et inapplicable de droit et de fait. Ainsi, les paires d'individus de même sexe seraient considérées comme n'ayant jamais été liées maritalement – c'est bien là une évidence humaine. Bien sûr, il ne serait pas nécessaire de demander à ces gens-là de rembourser les privilèges et bienfaits malencontreusement et injustement reçus entre-temps, disons par erreur plutôt que par une volonté de méfaire étant donné que des apparences de procédure démocratique et de pouvoir étatique les y auront encouragés. Une « apparence » analogue à la légalité d'une France de Vichy contre celle de De Gaulle, d'une Allemagne hitlérienne, d'une Russie soviétique, d'une hérésie chrétienne contre l'universalité de l’Église, d'une assemblée autoproclamée contre « la société civile3 » de son pays. Le souci de respecter textes et recettes comme celui de reprendre des symboles routiniers et entendus, allié à un sentiment de contrainte et d'obligation de la part des sujets, reste le meilleur ami des totalitarismes, plus efficaces encore sur les consciences que sur les corps. Demain, des enfants seraient dans les faits nourris par deux femmes ou deux hommes – si ce n'est plus ? – mais ils ne seraient réellement pas leurs enfants et ne pourraient jamais l'être, contrairement à l'enfant adopté au sein d'une – vraie – famille où il pourrait être la progéniture d'un père et d'une mère, même si ces derniers sont accidentellement stériles. De fait, ces enfants seront toujours les perdants des crimes commis par leurs tuteurs « parents 1, 2, 3 etc. » mais surtout par les tyrans socialistes. Il n'a jamais été dit que l'erreur n'entraînait pas des conséquences et des dommages réels, consistants. Mais le – vrai – droit, lui, ne doit pas continuer à mentir, afin de ne point continuer à engendrer des situations de fait horribles et inacceptables, anesthésiant toujours plus les consciences et la liberté de nos chers compatriotes, par démission et mauvaise résignation.

Une telle « déclaration en nullité » de la folie Taubira aurait également quelque ressemblance avec les enquêtes de noblesse lancées par Colbert et Louis XIV. Des familles n'ayant jamais été nobles avaient pourtant réussi – un certain temps – à bénéficier d'avantages fiscaux, sociaux et moraux qui n'auraient jamais dû les concerner, en bénéficiant de la considération de voisins, par duperie, à défaut de parchemins. La législation louis-quatorzienne les a tout simplement et très justement – hors quelques cas isolés – privées des privilèges qu'elles n'avaient jamais gagnés ni mérités, ni d'Ève ni d'Adam. En l'occurrence, le fait – frauduleux, quelle qu'en soit la conscience des personnes incriminées – n'est donc pas le droit. Réduire en poussière la terrifiante initiative de ce gouvernement socialiste n'est pas une question d'« extrémisme » mais un impératif de réalité, de vérité, d'honnêteté. Soit l'on accepte le mensonge institutionnalisé, soit l'on se contente de reconnaître ce qui est, véritablement, sans commettre le crime déshonorant de conforter certaines personnes dans leur erreurs juridiques et factuelles. Mais trop nombreux sont les politiciens préférant la facilité aux exigences du courage et de l'honnêteté, y compris et surtout à notre droite. Trop habitués à mentir, ils acceptent, consciemment – quelle bassesse! – ou inconsciemment, de prendre des vessies pour des lanternes. De prendre un fantasme adolescent pour une loi. De prendre pour un mariage une association parodique. La réalité a tôt fait de rattraper des hommes. Dans cette affaire, c'est bel et bien le déni du réel qui obscurcit les consciences et l'esprit social ; le remettre au goût du jour, c'est alors concourir à la résurrection du bien commun.

1Édition du 27 mai 2013.

2Conformément à la si juste formule de Jean-Yves LE GALLOU.

3Louis, vicomte de Bonald.

Rédigé par Jean de Fréville

Publié dans #ONLR, #annulation, #loi taubira, #actu

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